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Chez les femmes ménopausées

Le soya et l'exercice pour réduire les maladies cardiovasculaires

Isabelle Dionne, vice-doyenne à la recherche et aux études supérieures à la Faculté d'éducation physique et sportive
Isabelle Dionne, vice-doyenne à la recherche et aux études supérieures à la Faculté d'éducation physique et sportive

8 janvier 2009

Diane Bergeron

C'est un fait établi, la graisse abdominale est particulièrement néfaste à la santé du cœur. Des chercheurs en gérontologie ont découvert qu'en matière de perte de graisse abdominale chez les femmes ménopausées, un programme d'exercices combiné à la prise de phytoestrogènes s'avère plus efficace que l'exercice seul.

Cette découverte pourrait avoir un impact important sur la santé des femmes puisque celles-ci présentent des risques élevés de maladies cardiovasculaires après la ménopause. «On est porté à croire que les hommes présentent plus de risques de maladies cardiovasculaires que les femmes. C'est vrai avant la ménopause, explique Isabelle Dionne, vice-doyenne à la recherche et aux études supérieures à la Faculté d'éducation physique et sportive. Après, la tendance s'inverse. Ce sont les femmes qui présentent davantage de risques comparativement aux hommes du même âge.»

Ce projet de recherche a commencé en 2004 par une année d'expérimentation auprès de 50 femmes ménopausées. Au cours des six premiers mois de l'étude, 25 d'entre elles ont pris un placebo et les autres, des isoflavones de soya. Les isoflavones font partie des phytoestrogènes (estrogènes d'origine végétale). Une fois absorbés par l'intestin, les isoflavones libèrent une substance qui agit comme les estrogènes.

Au cours des six mois suivants, le groupe qui prenait des isoflavones a également suivi un programme d'exercices aérobies et musculaires à raison de trois séances par semaine. Avant, pendant et après la période d'expérimentation, une série de tests ont été effectués avec les participantes de l'étude pour mesurer la masse grasse, la masse musculaire, le cholestérol sanguin, certains facteurs reliés au diabète de type 2, etc. Il aura fallu deux ans pour compléter l'étude d'intervention et procéder à ces analyses, ce qui a nécessité le concours de Martine Fisch, infirmière au Centre de recherche sur le vieillissement, d'un médecin, de kinésiologues et de nutritionnistes.

«Nos analyses ont amené deux conclusions, raconte Isabelle Dionne. La combinaison d'exercices et d'isoflavones agit d'une part sur une hormone appelée sex-hormone binding globuline (SHBG) qui elle, est liée aux risques de maladies cardiovasculaires. D'autre part, cette combinaison est associée à la perte de graisse abdominale.»

Ces conclusions confirment l'hypothèse de base de la professeure Dionne et de son étudiante Mylène Aubertin-Leheudre. «Notre hypothèse émanait d'études majeures publiées en 2002, relate la chercheuse. Ces études établissaient que chez certaines femmes, l'hormonothérapie augmente le risque de maladies cardiovasculaires. Cette découverte a fait chuter l'usage de l'hormonothérapie. Beaucoup de femmes se retrouvaient donc sans solution pour contrer les malaises associés à la ménopause. C'est pourquoi nous voulions explorer une thérapie alternative qui n'aurait pas d'effet néfaste sur le risque de maladies cardiovasculaires.»

Faut-il se lancer maintenant dans l'exercice et les isoflavones?

Dans le cadre du projet de recherche, cette dame participe à un programme d'exercices combiné à la prise d'isoflavones.
Dans le cadre du projet de recherche, cette dame participe à un programme d'exercices combiné à la prise d'isoflavones.
Photo : CSSS-IUGS

Avant d'émettre une recommandation à la population, il faut mener un essai clinique. Cette nouvelle étape débutera le 5 janvier pour Isabelle Dionne et son équipe. «Il nous reste à vérifier si la perte de graisse abdominale est due au fait que les femmes ont pris des isoflavones pendant un an», dit-elle. Le nouveau protocole de recherche sera effectué auprès de 120 femmes réparties en quatre groupes.

Cet essai clinique est rendu possible grâce à une subvention des Instituts de recherche en santé du Canada et à une commandite d'Arkopharma, qui fournira gracieusement les suppléments d'isoflavones. Cette étude, tout comme la précédente, sera réalisée au Centre de recherche sur le vieillissement, le plus important établissement du genre au Canada.

Faut-il pour autant attendre qu'une recommandation soit émise avant de consommer des isoflavones et de faire de l'exercice? «Les bienfaits de l'exercice sont déjà connus, peu importe l'âge, répond la professeure Dionne. Rien n'empêche de se doter d'un programme d'exercices adapté à sa condition. C'est le rôle du kinésiologue de formuler un protocole d'exercices qui tient compte de la condition de la personne et de ses objectifs. Quant aux isoflavones, on peut dès à présent valoriser les produits dérivés de soya comme le tofu dans son alimentation.»